La Fête du Bouc La fiesta del chivo…passage puissant de la littérature à la scène.
La fiesta del chivo
La fête du bouc
“Trujillo commande sur terre et Dieu dans le ciel”
Au Théâtre Infanta Isabel à Madrid
Du 15 septembre au 20 octobre 2020
Adaptation Natalio Grueso
Mise en scène Carlos Saura
D’après un roman de Gabriel Garcia Marquez
La Fiesta del chivo, roman du Prix Nobel de Littérature 2010, Gabriel Garcia Marquez, auteur Péruvien Espagnol né en 1936, est mis en scène par Carlos Saura, cinéaste renommé, on se souvient de son film Cria cuervos (Élève des corbeaux …. Ils te crèveront les yeux). Les acteurs sont également renommés en Espagne.
L’adaptation scénique reprend une partie de la trame du roman, se centrant sur les relations du dictateur avec sa cour et de la fille Urania avec son père. Les conjurés, avant, pendant et après l’assassinat sont laissés de côté par rapport au roman.
On entre dans les pensées et dans la cours du dictateur, Rafael Trujillo qui a régné entre 1930 et 1961 sur l’ile de Saint Domingue. Soutenue par l’armée, l’église et la bourgeoisie, il a perpétré des massacres pour affermir son pouvoir.
Le décor, simple, un grand miroir à droite dans lequel le dictateur se contemple satisfait de lui, un fauteuil et une chaise. Au fond un grand panneau sur lequel seront projetés des images de couples dansant, de promenade arborée, du palais du dictateur et enfin de son auto mitraillée.
La musique, discrète, soutient l’action. Elle est peut-être redondante pour marquer l’assassinat du dictateur.
La première scène nous présente le dictateur qui monologue : il a la sensation d’être seul, mal compris, et méprise sa femme et ses enfants, des incapables, pour lesquels pourtant il oblige le peuple à les admirer.
Puis son officier de confiance vient lui expliquer comment il fait disparaitre les cadavres des opposants en les lançant aux requins.
Sa cour le suit, des hommes tout dévoués à son pouvoir, tremblant de peur de lui déplaire. Ce sont des éloges de son pouvoir, le sauveur de l’ile, une soumission absolue à ses caprices, lui préparer une fête d’anniversaires en détournant les fonds des hôpitaux et des écoles.
Ces scènes sont entrecoupées par l’arrivée de Uriana, poussant le fauteuil sur roue sur lequel son père, paralysé et ne pouvant pas parler, est assis. Elle essaye de comprendre ce qui s’est passé en interrogeant son père, se souvenant de son enfance heureuse. Elle lui dit que son esprit est enfermé dans la pire des prisons, son corps.
Ce sénateur étant tombé en disgrâce, parce que le dictateur a eu l’impression qu’il était moins fidèle, moins dévoué n’a comme solution, pour retrouver les bonnes grâces de son maitre que de lui offrir sa fille de 14 ans. La seule scène où le père et la fille se parlent est celle où il lui demande d’aller voir le dictateur, en sachant bien ce qui va se passer.
La fille est reçue par le dictateur de 83 ans, dans son palais. Pour l’amadouer un lui propose de danser mais comme il la serre de près elle le repousse. Il la jette par terre, sur le ventre, saute sur elle, et la viole. Elle pleure et essaye de se défendre, il crie et continue. Ils se relèvent et elle s’enfuit alors qu’il essaye de la retenir. La scène reste sobre mais très violente. Après cela elle s’enfuit en Amérique où elle va faire une brillante carrière d’avocate. Mais elle avoue dans la dernière scèhne, qu’elle se sent vide, avec un dégout des hommes.
Le dictateur est assassiné.
Le jeu des acteurs est juste, sans excès, pas de truc à la mode, sans surjouer les horreurs qu’ils nous racontent sur un ton naturel. Le massacre des Haïtiens, l’ile est partagée en deux, à la machette pour faire penser que c’est le peuple dominicain qui en est l’auteur…
En bref une histoire de la dictature qui nous en rappelle d’autres et un essai de comprendre pourquoi certains hommes peuvent se dévouer corps et âme à un dictateur.