L’Amour médecin. Molière fait un joyeux retour au parc de la Gatineau

L’Amour médecin. Molière fait un joyeux retour au parc de la Gatineau

photo Fâcheux théâtre.
Sylvain Sabatié – en Faux médecin.

 

 

L’Amour Médecin  de Molière, Mise en scène de Sariana Monette-Saillant. Ce nouveau volet de « Molière estival » est une production du Fâcheux Théâtre  présenté au parc Sainte-Thérèse à Gatineau.

L’Amour Médecin,  une comédie ballet  de Molière très populaire à la cours mais Molière s’inspire surtout des  types  qui sont représentés par les masques de la  Commedia dell’arte. Cette production date  de 1695.  Représentée pour la première fois par la  Troupe du roi à  Versailles, elle fut  reprise souvent depuis et ce soir à Gatineau, la troupe des « Fâcheux »   joue avec un   merveilleux sens de fantaisie, de liberté corporelle et  de fraîcheur ,  grâce aux quatre comédiens et à une mise en scène débridée de la très douée Sariana Monette-Saillant.    Ils ont abandonné  les masques  mais le jeu a bien compensé  l’absence de ces visages figés qui  affirment l’identité de tous les personnages  d’origine italienne en déplaçant leurs interprétations  sur l’ensemble du corps!

Voici le troisième spectacle  présenté en été par les  Fâcheux , une troupe de la scène francophone  qui   cherche à divertir tous les publics mais qui souhaite aussi  mener  une recherche de fond sur  l’œuvre de Molière , sa dramaturgie, sa vision du jeu, sa forme de parodie, sa  réflexion critique  (politique et sociale), sur la manière  dont il intègre à la scène  les théâtres populaires de son époque, assortis d’une   réflexion  critique sur  sa propre société .  Sa parodie du père tyrannique Sganarelle et des médecins du roi   est  féroce et nous tient en haleine dès le début par le rythme  du jeu,  par la manière dont Sganarelle (David Bélisaire) manipule les traits de son visage  et la flexibiltié  de son corps mis en  évidence autant  par les jeux textuels  que par la qualité de sa voix.

L’Amour Médecin
David Bélizaire en Sganarelle.

Il faut noter aussi l’excellent adaptation  réalisé par Sylvain Sabatié  qui garde des éléments  linguistiques et le rythme de l’original, tout en intégrant des situations, des références, du vocabulaire, tels que des  renvois tout à fait modernes ponctués de  barbes critiques  qui visent l’actualité québécoise.    En somme, un moment de grande joie et de plaisir pour les petits et les grands..

Rapidement donc, il s’agit de  Sganarelle, père de Lucinde, personnage  type hérité de la tradition de la Commedia dell’arte  dont le jeu explosif  et époustouflant de David Bélizaire était  excellent.   Ce père tyrannique, désespéré, jaloux,  possessif, et délirant,  s’inquiète de l’étrange maladie qui  s’est  accaparé de sa  fille Lucinde  ( Virginie Houët )la comédienne qui se transforme sans cesse  avec brio grâce à son recours aux multiples costumes,  aux grimaces, aux  grognements,  aux changements de  voix et de tout son appareil physique et vocal  associé au jeu de la Commedia . Les jeux de cache-cache sous les arbres devenus des  coulisses  en plein parc,  permettent aux comédiens de se rhabiller et se déshabiller  sous le feuillage des arbustes  au   fond de la scène alors  que la musique secondaire ainsi que le cliquetis des sabots du cheval de Clitandre sont assurés par une jeune femme  assise sur la pelouse un peu à l’écart du jeu. Une trouvaille très astucieuse.

Sganarelle,  enragé par le comportement de sa fille qu’il persiste à ne pas écouter,   convoque quatre médecine  pour en savoir plus sur son étrange maladie. Il écoute attentivement tous les  conseils  de ce groupe de « spécialistes » dont ceux de Lisette, la vieille servante   jouée par Sébastien Lajoie , le  personnage  qui   devient le modèle même du franc parler  de la servante chez Molière. Elle a la parole quasi libre, toute absence de scrupules, de honte, de bienséances, Elle joue un rôle important  dans le dénouement de cette situation que le père refuse  comprendre..    Clitandre ( Sylvain Sabatié), l’amant de Lucinde  déguisé en  faux médecin, rend le jeu encore plus  piquant puisqu’avec l’appui de la servante Lisette  et  la fille de Sganarelle,  ils arrivent à dévaliser le père de son bien. Faut-il avoir pitié du pauvre père pris dans ce piège ?  Rien n’est moins  évident puisque Sganarelle obtient exactement ce qu’il mérite!

Toutefois, c’est surtout le jeu qui attire le spectateur actuel.   Rythmé, stylisé ,  enlevé, , ces quatre  comédiens font bonne équipe  avec les   costumes et  accessoires (d’Andrée –Eve Archambault)  à l’appui et l’œil perspicace du metteur en scène Monette-Saillant qui  assure l’orchestration de l’ensemble.

Surtout nous nous réjouissons du portrait de ces médecins snobs,  bavards,  indifférents aux malades, qui proposent toutes  sortes de remèdes farfelues  les uns en désaccord   avec les autres.   Leurs  discussions sont ponctuées d’intermèdes chantés et  joués, selon la tradition de la comédie ballet de Moliére  alors que les chansons sont bien modernes; .  La version de  Blowing in the Wind  (en anglais) et d’autres chansons  qui font danser telles que  I like to Move it Move it…

L’Amour médecin devient un  divertissement délicieux pour toute la famille

Juillet 2018 dans le parc Lafontaine et le parc Sainte-Thérèse de Gatineau.

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