L’Amour à l’Agenda au Théâtre de l’Ile. Ce Michel Marc Bouchard estival est surtout une question de goût.

L’Amour à l’Agenda au Théâtre de l’Ile. Ce Michel Marc Bouchard estival est surtout une question de goût.

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David Jenniss et Frédérique Thérrien …

Photo: Théâtre de l’Ile

Il est difficile d’associer le nom de Michel Marc Bouchard (auteur québécois d’œuvres aussi recherchéess que Les Feluettes)  à cette soirée de folie furieuse trempée dans le burlesque kitsch inspiré du cinéma comique hollywoodien. Mais, voilà ce à quoi Bouchard, le maître de l’écriture théâtrale, se dédie depuis un certain temps.

Après tout, quelle meilleure manière de faire de l’argent pour un auteur de théâtre, surtout en été ? Il est rassurant, toutefois, que le côté kitsch n’ait rien à voir avec l’auteur dramatique. Le style est plutôt le résultat des fantasmes débridés du metteur en scène, libéré par l’absence de toute indication scénique dans le texte. On assiste à un chassé-croisé entre les parents sur le point de se séparer et le jeune couple sur le point de s’installer dans son propre appartement. La mère veut sa liberté, le père pleure la perte de sa fille (Patricia), Richard le jeune marié est confus et Patricia croit qu’elle sait ce qu’elle fait. À partir de ce quatuor de relations parfaitement équilibrées, on se heurte aux malentendus entre gais et « straights », aux conflits de générations, aux conceptions différentes du mariage. Finalement entre la jalousie, la frustration, la panique, le stress provoqué par le travail et les ambiguïtés identitaires, tout est bousculé, y compris les notions du couple les plus solides.

C’est étourdissant. Le dialogue est pétillant, le rythme soutenu, et la structure de l’œuvre impeccable. On ressent la main d’un maître qui sait nouer plusieurs intrigues à la fois, faire éclater des rebondissements au bon moment, et faire tout basculer dans un chaos parfaitement orchestré qui finit bien par s’arranger.

Toutefois, je crains que le travail débridé de Jean-Stéphane Roy qui aboutit à un délire quasi cinématographique, finisse par noyer les complexités de l’intrigue et transformer tous les acteurs en clowns. Ce n’est que du théâtre d’été, direz-vous, mais c’est tout de même trop. Déjà le récit est tellement chargé d’éléments invraisemblables et tarabiscotés , qu’on se demande à quoi bon charger la scène encore davantage de tout ce cirque extratextuel : grimaces, hurlements, explosions de sentiments, tics nerveux , crises de nerfs, au point où certains les répliques perdent leur sens, tandis que toutes les nuances disparaissent.

Nicolas Desfossés (Paul- le copain de la mère), sait se tirer d’affaires pour nous faire rire, sans céder à la tentation du cabotinage; son jeu est un peu plus subtil et toujours rafraichissant! Paul est un homme gai qui fait semblant de flirter avec Huguette pour que son mari Richard deviennent jaloux. Les propos ne sont pas du tout originaux mais le personnage composé par Desfossés est fort attachant. Les regards presque subtils de l’acteur nous mènent très loin lorsqu’ils nous renvoient , comme un clin d’œil quasi parodique, aux personnages torturés des premières œuvres de Bouchard, et parfois même, au monde de la La Cage aux folles. Cet acteur habite son personnage et touche à quelque chose d’émouvant et de terriblement drôle.

En somme, ce théâtre est surtout une question de goût. On voit que ce metteur en scène est capable de passer d’un style à un autre sans effort apparent, et sa vision esthétique est toujours parfaitement claire mais en ce qui me concerne, ce genre de burlesque qui frôle le grotesque est tellement kitsch qu’il noie les propos de la pièce. Sans doute, le metteur en scène a imposé un tel style parce qu’il connait bien les attentes d’un public estival et en effet, le public était tout à fait ravi.

L’Amour à l’agenda continue jusqu’au 24 août au Théâtre de l’ile.

L’Amour à l’agenda de Michel Marc Bouchard, mise en scène de Jean Stéphane Roy.

Distribution : Nicolas Desfossés (Paul), Sasha Dominique (Huguette) , Dave Jenniss ()Jérôme), Richard Léger (Richard), Frédérique Thérrien (Patricia).

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